Dévissage : comprendre un phénomène mécanique complexe

Le dévissage, souvent confondu avec le desserrage, est un phénomène mécanique distinct qui continue de poser des défis dans la conception d’assemblages vissés. Malgré les avancées technologiques, il reste un sujet d’étude actif, en raison de ses implications critiques dans de nombreux secteurs industriels.
Définition et distinction
Le dévissage désigne un mouvement angulaire relatif entre une vis et son taraudage, entraînant une perte de tension. Contrairement au desserrage, qui résulte entre autres d’un tassement ou d’un fluage des matériaux, le dévissage implique une rotation involontaire de la vis. Cette nuance est essentielle pour comprendre les mécanismes en jeu et développer des solutions adaptées.
Enjeux industriels
Les conséquences du dévissage peuvent être dramatiques. Des exemples notables incluent le crash du vol Emery Worldwide 17 en 2000 et l’explosion d’un train-citerne au Royaume-Uni en 2020, tous deux liés à des défaillances de fixation. Ces incidents illustrent la gravité potentielle du phénomène, même lorsque sa probabilité d’occurrence est faible.
Mécanismes physiques
Lors du serrage, un équilibre complexe de couples de torsion s’établit dans la vis. Une fois la clef retirée, un micro-glissement sous la tête de vis peut inverser la direction du frottement , pouvant ainsi amorcer (initialiser) le processus de dévissage. Ce glissement, souvent sub-micronique, est difficile à détecter mais joue un rôle crucial dans la réorientation des contraintes de cisaillement.
Méthodes d’essai
Trois grandes familles de sollicitations sont utilisées pour tester la résistance au dévissage :
- Sollicitations axiales (vibrations, chocs)
- Sollicitations transversales (essai de Junker)
- Sollicitations de torsion
Les sollicitations transversales sont particulièrement critiques, car elles favorisent les micro-glissements locaux, catalyseurs du dévissage.
Limites de la simulation numérique
Les outils de calcul par éléments finis peinent à modéliser le frottement de manière réaliste. Les lois de comportement actuelles ne prennent pas en compte des paramètres essentiels comme l’évolution du frottement avec le temps ou l’amplitude du micro-glissement. Les approches analytiques ou semi-analytiques offrent aujourd’hui de meilleures perspectives.
Solutions pratiques
Parmi les solutions courantes figurent les rondelles spécifiques (Grower, Nord-lock), les écrous auto-freinés, les colles frein-filet ou encore les dispositifs mécaniques comme les goupilles. Toutefois, ces méthodes ne suffisent pas toujours. Une approche plus globale peut inclure :
- L’augmentation du couple de serrage
- Le renforcement des frottements
- L’accroissement de la raideur de l’assemblage
- La réduction des excitations mécaniques
Conclusion
Le dévissage reste un défi technique majeur, en particulier dans les environnements soumis à des sollicitations dynamiques. Sa compréhension nécessite une approche fine des phénomènes de frottement à l’échelle microscopique. Si les solutions existent, leur efficacité dépend fortement du contexte d’application et de la précision des analyses. La recherche continue dans ce domaine est indispensable pour garantir la fiabilité des assemblages vissés dans des secteurs critiques.
Source : Dévissage : Un vrai « serpent de mer » par Jean-Louis Ligier
Jean-Louis Ligier est ingénieur conseil spécialisé en mécanique, tribologie et analyse de défaillances. Il a travaillé chez Renault, PSA et Glacier Vandervell, et enseigné la mécanique en Suisse pendant 12 ans. Auteur de plus de 80 publications, il intervient auprès de grands industriels comme EDF, MAN ou l’industrie horlogère.
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